Petite pause.
La journée a été chargée, comme souvent ces derniers jours.
Elèves, visites, maladies, accidents en cours, heures supplémentaires. Hier, je n’ai même pas eu le temps d’aller manger dans la Grande Salle, comme je le fais d’habitude, peu après la reprise des cours. Du coup, j’ai dû aller demander un sandwich en vitesse dans les cuisines, pour le manger à mon bureau entre deux visites. Aujourd’hui, j’ai eu plus de chance. J’ai eu le temps de manger convenablement bien que rapidement, une nouvelle fois.
Ainsi donc, petite pause.
Ce n’est pas pur autant que je peux rester inactive.
Papiers, ordonnances, arrêts, justificatifs médicaux. Tout ça à vérifier. Souvent. Convoquer les élèves dont les ordonnances arrivent à terme, vérifier que les médicaments qu’ils me confient sont suffisants, leur rappeler de faire renouveler leurs ordonnances si jamais ils sont sous traitement, vérifier le bienfondé des justificatifs, et cetera. Je me dépêche. A cause des mes journées chargées, je n’ai pas vraiment le temps de m’occuper de tout. Ainsi, je dois parfois prévenir dans l’urgence les élèves pour leurs ordonnances par exemple. Ou je vérifie les justificatifs des jours après qu’on me les ait confiés.
Je soupire.
Un léger mal de crâne commence à se faire sentir.
J’aurais vraiment besoin d’un assistant.

On toque à la porte.
Je marmonne comme quoi on peut rentrer.
Je finis rapidement de lire l’ordonnance que j’ai sous mes yeux explosés avant de faire glisser le tout sur le côté. Un “Madame Loisel“ me parvient. Pourquoi ? Pourquoi toujours “madame“ ? Certes, c’est devenu la réglementation, mais franchement, je ne pensais pas que les mœurs changeraient si rapidement. Je pensais encore avoir le droit à quelques “mademoiselle“, avant qu’on me vieillisse d’aux moins trente ans à chaque fois qu’on s’adresse à moi. Je devrais mettre un panneau sur la porte : “Appelez-moi Mademoiselle Loisel. Les “madame“ font mal à mon égo. Merci d’avance.“
C’est presque devenu un running gag.
Je me redresse en me frottant la tempe.
Aelgyth. Je le vois souvent ces derniers temps.

- Bonjour, Aelgyth.

Je croise les doigts pour ne pas écorcher son prénom.
J’en serais bien capable.
Son oiseau nous salue également. Et Epsilon.
Pauvre oiseau. Il s’échigne à essayer de parler à mon familier, alors que celui-ci parle très rarement aux autres. Et surtout pas aux autres familiers. Le pauvre Derrick de M. Bartosz ne s’en est pas encore remis, aux dernières nouvelles. Mais c’est beau l’espoir. C’est beau d’essayer. Il faut le soutenir dans sa démarche. Mais ce n’est pas Epsilon qui risque de le faire.
Ce dernier est perché sur le perchoir que je lui aie installé en début d’année sur mon bureau. Il réagit, bien sûr. Il n’est pas totalement sans réaction. Mais il snobe le familier du pauvre élève avec dédain, puis se met à regarder ailleurs sans un mot. Je soupire. J’ai déjà bien assez essayé de le reprendre concernant son attitude.

- J'espère que je ne vous dérange pas ?
- Non, non, je finissais tout juste ce que je faisais.

Je lui pointe mes kilos de papier posés sur mon bureau.
Il s’agit de l’autre facette du métier. Comme quoi, on ne fait pas que soigner des gens et prêter une oreille attentive aux élèves. On doit aussi gérer des tas de papiers. C’est côté chiant.

- Tu peux rentrer.

Je lui indique de venir s’asseoir sur l’une des chaises en face de mon bureau.
D’un coup de baguette, je débarrasse définitivement les derniers papiers qui restent en face de moi, afin de lui indiquer que je suis toute à lui. Les papiers se rangent seuls dans l’armoire derrière moi, qui se referme en douceur. Pas besoin de lui exposer l’intérieur. Il est rempli des dossiers médicaux des élèves et du personnel.
Une fois qu’Aelgyth s’est assis, je continue.

- Je peux t’aider ?